Affaire Boulerice c. Chambre des communes: la sixième erreur, relative aux « débats et travaux du Parlement », de la Cour d’appel fédérale

La sixième erreur du juge en chef Noël et de la Cour d’appel fédérale est – encore dans l’hypothèse où le Bureau de régie interne (BRI) ferait partie de la Chambre des communes de manière à pouvoir se faire attribuer des privilèges parlementaires – d’avoir conclu que la demande de révision judiciaire de Boulerice et al. devait être radiée en vertu du privilège  de «débats et travaux du parlement» (104-118).

Certes, le privilège de liberté de parole et de débats dans le cadre des travaux parlementaires (proceedings in Parliament) était une catégorie «établie péremptoirement» de privilèges dont jouissaient la Chambre des communes britannique au moment qui est déterminant aux termes du par. 4a) de la Loi sur le Parlement du Canada (LPC) et du test élaboré dans l’arrêt Vaid. Il l’était aussi au moment où la version actuellement en vigueur du par. 52.2(2) de la LPC, qui veut préciser qu’«[i]l est entendu que les délibérations du bureau sont des délibérations du Parlement», a reçu la sanction royale, soit le 22 juin 2017. Nous le savons, ce moment est déterminant au sens de l’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867 (LC 1867), qui conditionne la validité de toute attribution de privilège parlementaire par la loi fédérale. Donc, dans l’hypothèse où le BRI ferait partie de la Chambre des communes de manière à pouvoir jouir de privilèges parlementaires, où est le problème ?

Ce dernier réside dans le simple fait que l’arrêt Chaytor ne laissait planer aucun doute sur le fait que, non, le «privilège parlementaire invoqué en l’espèce» (dans Boulerice) (par. 118) ne relevait pas de cette catégorie. Encore une fois, je vais devoir me répéter, ici au sujet de ce fameux arrêt de la Cour suprême britannique. Pour Lord Phillips, ce n’était que l’allégation déclinatoire relative à la demande de remboursement de dépenses elle-même qui devait être qualifiée d’allégation de privilège de liberté de parole et de débat dans les travaux parlementaires, tandis que l’allégation déclinatoire relative au contrôle d’une telle demande devait être qualifiée d’allégation de privilège de connaissance parlementaire exclusive. Pour Lord Rodger, il était inutile en l’espèce, sur le plan des faits, de distinguer la demande de remboursement de son contrôle et, sur le plan du droit, de distinguer un privilège relatif à la liberté de travaux parlementaires de celui de connaissance parlementaire exclusive. Quant à Lord Clarke, ses motifs pouvaient difficilement admettre une telle réduction du premier au second privilège parlementaire. Et alors ? Alors cela veut dire qu’aucun membre de la formation de la Cour suprême britannique qui a entendu l’affaire Chaytor n’a envisagé que le contrôle des demandes de remboursement de dépenses ou d’autres allocations parlementaires puisse relever de cette catégorie que le juge en chef Noël désigne par les mots de «débats et travaux du Parlement».

Cela veut dire aussi que, même si le BRI devait se révéler appartenir à la Chambre des communes, ce qui n’est vraisemblablement pas le cas, le par. 52.2(2) de la LPC serait inconstitutionnel, et ce en vertu de l’article 18 de la LC 1867.

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